L’homme qui te ressemble

La poésie, que Jacques Prévert définissait  comme «  un des plus vrais, un des plus utiles surnoms de la vie »,  immortalise tout ce qu’il y a de meilleur et de beau dans le monde.

Cher lecteur de la revue Bancal,

Il me revient aujourd’hui l’honneur – que dis-je, le plaisir ! – d’ouvrir avec vous une parenthèse poétique. Je vous propose un voyage à la rencontre de poètes et poétesses venus des quatre coins du monde. Des artisans du langage qui, par la force de leurs images et de leurs mots, nous offrent leur regard singulier sur l’existence. Des voix qui se font entendre parfois là où on ne les attend pas.

Pour cette première chronique, posons nos bagages en Afrique centrale, au Cameroun plus précisément, terre natale de Philippe Louis Ombedé, écrivain, romancier, journaliste, dramaturge et poète, que l’on connaît mieux sous son pseudonyme : René Philombe.

Cet homme de lettres fut nourri par la littérature française et marqué par le mouvement de la Négritude, ce courant qui revendique l’intégrité de la culture noire et invite à se libérer des séquelles du colonialisme. Dans son œuvre, le poète camerounais a su conjuguer ce combat avec une célébration de la vitalité africaine et un appel constant à la fraternité universelle.

Le poème que je souhaite partager avec vous a été écrit en 1977, mais il résonne aujourd’hui avec une intensité particulière. Car la crise vécue par ceux que l’on appelle migrants – et que je préfère nommer réfugiés – trouve dans L’homme qui te ressemble une résonance saisissante, comme s’il avait été composé pour notre époque. L’universitaire italien Alessandro Portelli le rappelle : « On n’entre pas à Lampedusa. On ne sort pas de Calais. On ne passe pas à Vintimille. De la Serbie à Budapest, on voyage dans des wagons plombés. À Ceuta et Melilla, enclaves espagnoles en terre africaine, comme à la frontière entre Bulgarie et Turquie, ou entre Hongrie et Serbie, des murs et des grillages s’élèvent. » (Il Manifesto, 30 juillet 2015).

Oui, cher lecteur, le monde est passé de 11 murs de séparation en 1989 – l’année où s’écroulait le tristement célèbre mur de Berlin – à 50 en 2015, dont le plus long s’étend sur 3 000 kilomètres entre l’Inde et le Bangladesh.

Face à ces murs, face aux préjugés et aux peurs, les poèmes de René Philombe incarnent un humanisme vibrant et une quête profonde de justice.

Voici donc l’un d’entre eux, véritable plaidoyer pour que l’humanité apprenne à dépasser ce qui divise et à reconnaître ce qui unit.