Summer of loge #2

Pour la sixième année consécutive, le théâtre de la Loge organise son festival Summer of Loge. Pendant trois semaines, concerts, conférences et formes théâtrales seront proposées, autour du thème « Big Bang Culte ». Partenaire de cette édition, le Collectif Open Source pose chaque semaine, dans la Revue Bancal, son regard sur les  propositions théâtrales présentées.

Pour la sixième année consécutive, le théâtre de la Loge organise son festival Summer of Loge. Pendant trois semaines, concerts, conférences et formes théâtrales seront proposées, autour du thème « Big Bang Culte ». Partenaire de cette édition, le Collectif Open Source pose chaque semaine, dans la Revue Bancal, son regard sur les  propositions théâtrales présentées.

Festival Summer of Loge, #6#2 : Le politique est dans la forme ? Le Summer of Loge est décidément le lieu où l’on peut découvrir ce qu’on n’oserait pas faire autrement. En l’occurrence, deux formes éphémères créées chacune en quatre jours.

Dans Arena, le metteur en scène Raouf Raïs (collectif Hubris) dispose le public en arène au centre duquel trois acteurs découvrent dans un vieux livre le serment des Jeux Olympiques de l’Antiquité grecque suivi d’une série de jeux. Ils vont, sous nos yeux, y jouer, pour de vrai. Des jeux d’enfants (le béret), de sport (la course), un concours de poésie (comme au temps de la Grèce antique où c’était une épreuve comme une autre)…

Dans Prologue au néant, manuel pour se sortir du trou, le collectif d’acteurs le TAC propose une série de tableaux scéniques qui interroge la manière dont nous, ou la Terre, ou nos relations, ou le jeu de l’acteur, sont sortis du néant. La lumière (sublime) y est un partenaire de jeu au même titre que les acteurs.

 Les deux formes, pourtant très différentes, renvoient à un certain nombre de questions communes :

– l’effacement du metteur en scène : le TAC revendique un travail d’acteurs (et ici, une créatrice lumière) sans metteur en scène. Et pourtant, des deux propositions, c’est paradoxalement celle où la mise en scène apparaît le plus clairement prise en charge. Sans doute parce qu’il y a eu un groupe dramaturgique et un regard extérieur. Raouf Raïs, de son côté, choisit de montrer des acteurs qui jouent à des jeux non scénarisés (ils ne savent pas à l’avance qui va gagner). Il se contente de juxtaposer les séquences et les musiques. Comme si il y avait une volonté presque politique de mettre en retrait le Grand Ordonnateur, de ne pas rendre une seule personne responsable de l’interprétation possible du geste proposé.

– un questionnement sur le jeu et la réalité: chez Raouf Raïs, l’intuition de départ est que regarder quelqu’un jouer sans faire semblant, comme au stade, peut susciter une fascination totale. Pour le TAC, on joue au non-jeu : on met en scène la répétition, les négociations entre acteurs, les ratages, les fous-rires, pour renouveler le plaisir de l’acteur. Dans les deux cas, on peut y voir une volonté d’en finir avec les faux-semblants. Comme si, aussi, le plaisir du jeu pouvait devenir une raison suffisante de monter un spectacle, et par extension, une raison de vivre.

– une audace sur la durée : la présentation du TAC durait à peine 30 minutes, et les jeux d’Arena n’hésitaient pas à prendre la durée dont ils ont réellement besoin. Dans les deux cas, on peut voir là un refus de céder au formatage habituel des spectacles – qui est exactement ce que permettent les conditions volontairement désinvoltes du Summer of Loge.

– un ancrage dans le « populaire » : Prologue au néant commence par un enregistrement téléphonique avec une grand-mère. Arena, par une chanson de Patrick Sebastien. Les accessoires sont dans les deux cas issus d’un univers volontairement pauvre, désuet et qui frôle le kitsch.

Tous ces questionnements témoignent à la fois d’une envie de critique, sur l’exercice du pouvoir dans un groupe, sur la réalité comme valeur, sur le conformisme, et d’une volonté de répondre à des injonctions politiques. Car le théâtre semble être devenu aujourd’hui le terrain d’expérimentation de tout ce qui a échoué dans la vie politique : la volonté de se reconnecter au peuple (avec tout le mélange de désir et de condescendance que cette expression peut comporter), la remise en cause de la gouvernance, les pièges du conformisme. La jeune création (et les lieux qui comme La Loge ont le courage de la soutenir) s’en fait ici l’écho, avec audace. Ces démarches nous posent en retour la question des écueils et des pièges (tant thématiques que formels) que nous tend cette surchauffe politique du théâtre.

 Le Collectif Open Source.

Dimanche 12 juillet – 15h « Au cœur du réacteur » : une rencontre-discussion avec les équipes artistiques du Summer of Loge sera animée par le Collectif Open Source. Entrée libre.


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Charlotte PALMA - Auteur

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