Schizophonies, partition impossible

Dans Schizophonies, partition impossible, j'ai eu l'impression d'assister à l'apparition de quelque chose de nouveau et singulier. Un langage scénique et littéraire qui, même s'il m'a fait penser à bien d'autres (Duras, Régy, Castellucci, Pommerat, Artaud), a trouvé sa personnalité propre et l'a pleinement réalisée. Courrez découvrir cet étrange et troublant objet scénique.

Dans Schizophonies, partition impossible, j’ai eu l’impression d’assister à l’apparition de quelque chose de nouveau et singulier. Un langage scénique et littéraire qui, même s’il m’a fait penser à bien d’autres (Duras, Régy, Castellucci, Pommerat, Artaud), a trouvé sa personnalité propre et l’a pleinement réalisée. Courrez découvrir cet étrange et troublant objet scénique.

Schizophonies, partition impossible

Quatre acteurs errent sur le plateau et partagent avec nous leur questionnement, tantôt concret, tantôt éthéré. On passe avec souplesse d’un registre à un autre, ou, pour reprendre une expression de Sarah Kane, d’un niveau de réalité à un autre. Une lumière instable plonge les corps  dans un clair-obscur aux couleurs changeantes, au milieu d’un noir épais. Des nappes de sons font sourdre une violence feutrée, qui ne se dévoile jamais totalement mais contribue à une angoisse, un malaise diffus. Des vidéos abstraites, à peine perceptibles, font peu à peu chavirer tout l’espace vers le vertige, le chaos, le trouble. Les corps, vite demi-nus, chauds, vibrants, fragiles, s’aventurent entre féérie (magnifiques et improbables costumes), cauchemar, et réalité banale ou tendre. Les mots nous entraînent dans un voyage dans un espace intérieur, mental, guidé par des misfits de la vie qui cherchent avec désarroi leur place. La beauté étrange et troublante du spectacle est de nous faire aimer peu à peu un entre-deux où rien n’est jamais défini, où l’on ne sait jamais, un état d’incertitude permanent, source de désarroi et de grâce. Les langages visuels et textuels s’épousent et se complètent à merveille, pour rendre toute partition impossible entre le beau et le laid, le vrai et le faux, le grain noble et le grain pourri. Tant dans sa dramaturgie que dans sa forme, Schizophonies m’a troublé, touché, violenté, fasciné. Cet univers abstrait, à la fois sensoriel et mental, ne plaira sans doute pas à tout le monde. Moi, j’étais séduit.

On pourrait louer Morgane Lory et lui attribuer tout le mérite de cet univers qui allie finesse, trouble, douceur et violence – mais ce serait injuste, car il s’agit bien là d’un processus de création collaboratif. Saluons donc chacun des membres de la compagnie DDN, sur scène ou en coulisses, pour avoir rendu ce diamant noir possible.

Mathieu Huot, membre du collectif Open Source

« Je précise, par honnêteté, que mon article n’est pas neutre, puisque je connais Morgane Lory et travaille avec elle dans le cadre du collectif de recherche sur la mise en scène Open Source. Il y a des moments où l’on est très fier de ses amitiés. Hier soir, devant Schizophonies, je me sentais, étrangement, honoré. »

Schizophonies / Partition impossible, texte et mise en scène de Morgane Lory, création sonore de Matthieu Canaguier, création Lumière de Nicolas Ameil, scénographie et vidéo d’Ophélie Bignon, avec Julien Crépin, Nadège Sellier, Sergueï Ryschenkow et Geoffroy Vernin

La Loge (Paris 11ème), du 24 mars au 3 avril 2015

Compagnie Le Don des Nues DDN


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Charlotte PALMA - Auteur

Description de Charlotte

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