Littérature // Wagner Schwartz

Ce jeudi 27 juin à 18h30, la librairie nomade "Books on the Move" en station au CND durant la plateforme chorégraphique internationale Camping accueille l’auteur, chorégraphe et performeur Wagner Schwartz pour la présentation de son ouvrage "Jamais ensemble mais en même temps / Nunca juntos mas ao mesmo tempo". Au programme lectures d’extraits et discussion avec l'universitaire Leonardo Tonus. A cette occasion nous publions le très beau texte que l’écrivain Thierry Illouz a écrit sur cet ouvrage.

La littérature est un secret, un mystère. Le récit de Wagner Schwartz reconduit cette surprise. Et plus encore, d’une façon renouvelée, construit une histoire au plus fort sens du terme – celle d’Adeline – qui captive et fascine par un système de révélations et de silences. Et c’est cela qui nous occupe, cette façon de retenir l’information romanesque et de faire de ces creux, de ces absences, de ces blancs, un élément narratif.

 

Le personnage est puissamment présent, les relations qu’il entretient avec son entourage : le café où elle travaille, l’amie qu’elle fréquente, l’amant. Cette relation avec le monde tisse littéralement un écheveau qui dessine une personnalité. Ce qui saute aux yeux dans ce récit et cette fois l’expression est absolument justifiée c’est d’abord l’inscription même du texte dans la page, le vide autour du texte. Cela n’est pas un simple dispositif éditorial, mais bien une intention d’écriture, comme si l’auteur écrivait aussi avec le vide.

 

Mais le personnage lui-même est inscrit dans le monde de la même manière, par ce qu’il refuse d’expliquer, de dire, de raconter. Adeline revient souvent sur ce besoin, ou cette volonté farouche de garder pour elle certains éléments du récit. Par ce procédé, le lecteur entre dans le roman. Le lecteur suppose, invente, reconstitue. C’est toute ce qui anime le rite littéraire qui se trouve en jeu : le manque, la résonance, l’espace partagé entre le lecteur et le personnage, l’échange. L’émotion s’installe, se creuse comme le silence sur un visage, en sculpte les traits.

 

On approche progressivement les enjeux, les forces de tensions, le travail et ses obligations, l’amour et ses déceptions, l’amitié, la maternité. Tout circule, tout fait sens, le mot et ce qui le suit : le blanc. Une vibration, un trouble, une empathie inexplicable, un lien entre les êtres, un lien tragique au sens premier, un lien qui contient tout du tissu des vies. Jamais ensemble mais en même temps dit le titre. Cet énoncé parabolique dévoile et précise l’approche de l’auteur : rendre compte du paradoxe de toute humanité, cette séparation originelle, mais pourtant conjointe, simultanée des existences.

 

Adeline est une figure familière, une figure de nous, un reflet complexe. Elle est partagée entre son souci et son application consciencieuse de faire ce qu’elle a à faire, de vivre sa vie. Et nous la suivons, nous la regardons, nous l’entendons. Nous buvons ses paroles et acceptons ses refus.

 

Schwartz parvient à sa façon, avec son propre vocabulaire, sa manière profondément poétique, de convoquer un monde, d’inaugurer un réseau d’images, de moments, de paroles et trace un sillon nouveau, audacieux qui demeure après la lecture suspendue en nous, une réussite du sens et de la ligne des destins.

 

Thierry Illouz

 

Audio : extrait lu par Maria des Medeiros

 

 

Wagner Schwartz  Copyright: Mario Miranda Filho

 

Books on the Move , Camping au CND
Rencontre le 27 juin à 18H30
avec Leonardo Tonus
au Centre national de la danse
1 rue Victor-Hugo
93507 Pantin


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Revue Bancal - Auteur

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