))B))rêve de jour // Mains d’assassin
21/04/2023
Chaque jour de la semaine, nous publions les chroniques de l'autrice Valéry Meynadier, des textes courts sur tout et rien, sur la littérature, l'art et les merveilles (ou les douleurs) du quotidien. Nous les appelons les brèves de jour, des (B)rêves, des rêves insufflés par le B de Bancal !
Peinture : Oskar Kokoschka
Pauvre gus, quand il est sorti de taule, il avait peur du paysage. Rien vu depuis quinze ans, il se sentait aveugle, muet, sourd…
De plus, il avait banni ses mains… Elles restaient en permanence derrière son dos, hors de sa vue, il les traitait de mains d’assassin… “C’est pas moi, il disait, c’est elles !” S’il avait pu les laisser à la fouille. “Une cellule, c’est un ongle, vous avez déjà essayé de vivre sur un ongle ? ” il disait…
Oh ça, y manquait pas d’esprit Gustin, il manquait juste de mains. C’était toute une comédie parfois pour qu’il mange, ouvrir une porte, ou se laver, il refusait d’y mettre les menottes, comme il disait. Il les avait tellement bannies de sa vie que la dernière année de sa détention, ses “touche à rien” comme il les appelait, ses “vauriennes” se manifestèrent à lui, impossible de les ignorer cette fois, des petits boutons gratteurs prenaient place & pas n’importe où sur les mains, dans les paumes & tout particulièrement sur les lignes de vie… Plus d’une fois, épouvanté, il me les a tendues : “elles me veulent quoi encore ? ”
Si vous avez une idée, je vous donne l’adresse de Gustin ?
Valéry Meynadier, 21 avril 2023
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