(B)r∃ve de jour // La rue de mon amie

Chaque jour de la semaine, nous publions les chroniques de l'autrice Valéry Meynadier, des textes courts sur tout et rien, sur la littérature, l'art et les merveilles (ou les douleurs) du quotidien. Nous les appelons les brèves de jour, des (B)rêves, des rêves insufflés par le B de Bancal !
Peinture : Giorgio de Chirico

En plus de ça, quelque chose d’autre l’empêchait de dormir.

 

& de me relater par le menu l’ouverture d’un bar qui venait de s’ouvrir en bas de chez elle, à mesure que la nuit tombait, le bar s’étalait, véritable pieuvre alcoolique, gobait l’espace en entier, insensiblement, sous ses yeux, la rue se transformait en bar ambulant & la musique suivait l’extension, à l’assaut de la lune dans le ciel, elle montait la musique, tandis que des créatures de type égotiste, la gorge débraillée, les veines dégénérées, verre à la main, empoisonnaient le silence, crachaient leurs noces à la face des impassibles ; quand le bar fermait, ils stagnaient comme le pus dans la plaie en bas de chez elle tandis que la rue se transformait en chatte en chaleur…

 

Ce sont les termes de mon amie, pas les miens.
La rue rampait, avec toute la raideur lascive du désir quand il en est à son point culminant & ne trouve pas l’assouvissement ; les petites fesses en l’air, la tête en bas, la rue avançait, grognait, quémandait, arrogante, sûre d’elle, chaque fenêtre était sa proie, un drap qu’elle soulevait, un lit où inventer sa jouissance, Comment vous ne m’entendez pas ? feulait la rue de mon amie.

 

Valéry Meynadier, 12 avril 2023


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